Good Morning England  

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Rang : A

En bref : Rock 'n' roll !

Pour un film rock 'n' roll, il fallait une critique rock 'n' roll. Good Morning France, vous êtes sur CinéBlog. Je suis Azariel, votre DJ de la critique le temps d'un article. Et c'est de Good Morning England que je vais vous parler. Mettez vos lunettes noires, mettez-vous un bon CD des Stones ou des Stooges, montez la sono', and let's go.

Soyons clairs (comment ne pas l'être en ayant commencé cet article par la note ?), Good Morning England est une véritable bouffée d'air frais. D'une mélancolie surannée qui caresse l'échine d'un film nimbé d'un grain de folie, l'hymne à la liberté éclaire les entrailles d'une Angleterre des sixities déjà médusée par la naissance du doux son contestataire. Poésie surréaliste et engagée se mêle au rythme endiablé issu du blues et du jazz. Sur un bateau pirate où l'on aime la Reine mais pas ses lois, les musiques de légende hurlent à foison. Le chant de cygne est pour ceux qui ne vivent plus avec leur temps, et le temps n'est plus à l'isolation dans un carcan moral pour le coup périmé. Glamour et musique bouent dans les veines des jeunes gens, la révolution était en marche et aucune interdiction ne pouvait empêcher cela.

Il fallait un réalisateur rompu à l'exercice du film choral pour permettre à tous ces DJ ne co-exister dans ce bateau radio afin que règne l'égalité de traitement entre les personnages alors que la mise en scène se devait d'être à l'image de son message. Qui de mieux que Richard Curtis, scénariste de renom, dont le premier essai fut une véritable réussite. Depuis Love Actually, il préparait ce coup en douce pour mieux fendre l'air du son des guitares. Son instrument : la caméra à l'épaule, virevoltante, psychédélique, à l'image de la musique qu'elle tente de saisir dans un cadre. Reste à son amour pour le bon vieux rock britannique d'antan de mener la danse, et de nous entrainer dans cette folie démesurée où l'orgasme s'attrape avec les yeux, les oreilles, et le coeur.



La générosité du propos fait la force de la partition de Curtis. Pleine et entière, elle vibre dans chaque fibre du long métrage, avec cette démence douce-amère qui brutalise notre aphasie naturelle pour nous rappeler au bon souvenir de la candeur infantile voilée par le quotidien et la noirceur des paysages sombres belliniens.

A la faveur d'une bande originale où se croisent The Who, Hendrix, Otis Redding, The Beach Boys, ou encore Paul Jones, Good Morning England rappelle le meilleur d'un temps où la musique rock était un plaisir et un cri. Il fallait un casting hors norme pour donner vie à cette lutte entre le gouvernement et ses opposants, d'où la présence de la quasi-totalité de la crême de la crême anglaise. Ces seigneurs de la comédie anglaise donnent leur envol à leur personnage farfelu, de Bill Nighy à Nick Frost en passant par le délirant Rhys Ifans. Ils arrivent à rendre cette abberation cinématographique aussi excitante que dantesque, qu'ils cabotinent ou qu'ils électrisent chaque centimètre de pellicule. C'est pourquoi ils sont tous irrésistibles. Même Kenneth Branagh tire son épingle du jeu et communique cette joie insensée dans la peau de ce ministre antipathique mais hilarant, véritable ronce dans la haie verdoyante de Radio Rock. Chacun a pris du plaisir et arrive à le communiquer à travers l'écran.



D'autant que le film durant plus de deux heures, il fallait maintenir le groove à flot avec un scénario volontairement déstructuré, aux antipodes d'une construction formaliste. Il n'en gagne que plus de sincérité et d'extravagance, la fantaisie de la mise en scène contaminant l'oeuvre jusque dans son essence matérialiste. Et le coup de génie a été de nous introduire à cet univers à travers les yeux d'un jeune novice, à la recherche de ses premières émotions sensuelles, puis gagné par l'effervescence planant autour de ces êtres nostalgiques avant l'heure. Le débordement d'énergie évite le trop-plein grâce au savoir-faire indéniable de Curtis, usant sans l'user du split screen pour convier le spectateur à s'émerveiller devant tant de fureur et de passion. Même les baisses de rythme s'avèrent salutaires, à l'image du rock, où l'alternance permet de mieux apprécier les moments forts pour prendre le temps de respirer quand la vague fait son chemin.

Véritable célébration d'un genre musical qui perdure depuis un demi-siècle, Good Morning England n'oublie pas pour autant d'être anglais, avec cette touche d'humour donnant la banane entre deux couplets. L'absurdité polyvalente favorise l'exode vers le trip de l'insolence et de l'irrévérence, les décibels cotoient les néréides croisées en pleine mer en compagnie d'un équipage se délectant des interdits. Un film rock construit de manière rock où règne un esprit rock. On en attendait pas moins.



This entry was posted on 10 mai 2009 at dimanche, mai 10, 2009 and is filed under . You can follow any responses to this entry through the comments feed .

17 commentaires

Que dire de plus ! Très bonne critique Azariel pour ce film que j'ai vraiment aimé. Une chose que l'on peut retenir: ce film, même si votre chien vient de se faire manger par votre grand-mère, vous rendra le sourire très vite ! En un mot: délirant !

11 mai 2009 à 11:23

@ Drazh : Je préfère imaginer le chien bouffer la grand-mère : ça c'est rock, dude ! :D

Merci pour le compliment sur la critique, mais entre nous, je n'arrive pas à croire qu'elle tienne la route : je l'ai rédigé complètement défoncé à l'alcool. J'ai beau me relire, je ne vois même pas en quoi j'étais dans un état trash. Peut-être le thème qui était adéquat à ma véhémence littéraire, parce que ça fait 15 ans que je jure que sur l'adage "Sex, drugs, & Rock 'n' Roll" ! =)

11 mai 2009 à 15:03

Je vais faire vachement plus court que pour Star Trek parce que ce film reste quand même très bon.

Je te trouve quand même bien trop enthousiaste dessus (ptet l'aclool ? :D).
C'est un bel hommage aux radios pirates, au rock, à la pop et aux années 60, mais ca n'est pas non plus un chef d'oeuvre.
Pourtant, et c'est la que c'est curieux, c'est quand même moi le fan des Beatles, des Stones et du son des sixties et seventies et toi le métalleux des années 80, 90 !
A méditer !

11 mai 2009 à 18:24

@ Astraal : J'étais déjà enthousiaste avant de forcer sur la bouteille, puisqu'on en avait parlé sur MSN alors que j'étais sobre comme le Christ.

Je n'ai pas besoin qu'un film soit un chef-d'oeuvre pour lâcher un A, si c'est la note qui te gêne. C'est un S que je réserve aux films dignes de cette nomination. Quant aux explications, j'ai envie de dire : tout est dans la critique ! En tout cas je suis entièrement satisfait de la note que j'ai donné au film de Curtis. Tu sais que parfois je suis entre deux rives, et que j'ai du mal à me décider. Mais là, ce n'est absolument pas le cas.

Je te rectifie sur mes goûts musicaux, j'aime le rock et ses déclinaisons de tout temps. Si j'ai mis du temps à accrocher aux Beatles, longtemps trop éducoloré à mon goût, j'ai toujours aimé les Stones, Led Zep', et tutti quanti. J'adore la pop-rock anglaise des années 60-70. Mais effectivement, ma préférence va vers le rock des années 80-90, à savoir les Metallica, les Iron Maiden, les Helloween, les Nightwish, les Nirvana, etc.

D'ailleurs si le rock anglais des années 60 a enfin son film avec Good Morning England, je considère que le rock des annees 80 a le sien avec les deux Wayne's World.

11 mai 2009 à 20:38

A la base j'avais déjà envie de voir le film, maintenant, je sais que je vais y aller.

11 mai 2009 à 22:11

@ Savon : Comme je t'envie de pouvoir découvrir ce film... Qu'on m'efface la mémoire ! Que je le redécouvre comme si je ne l'avais jamais vu ! Donnez-moi la lampe d'Aladdin par pitié !

12 mai 2009 à 00:53
Poggi Caroline  

"D'ailleurs si le rock [anglais] des années 60 a enfin son film avec Good Morning England...".

C'est un peu comme ranger la musique anglophone dans une même boite.

Hendrix chanteur américain
Easybeats groupe australien
Box Tops groupe américain
Turtles Californien

Et Let's Dance = Pop 80's.

ETC...

A Bon entendeur, salut.

12 mai 2009 à 09:42

@ Poggi Caroline : Effectivement, la bande originale de Good Morning England n'est pas exclusivement constituée de groupes pop-rock anglais. D'ailleurs le film se veut la célébration de la pop et du rock du monde entier, en passant par l'histoire de ces bateaux radios qui devaient émettre illégalement afin que les anglais, condamnés à l'époque à n'en écouter que très peu sur les ondes, puissent twister sur un son endiablé.

Cependant la majorité des groupes demeurent britanniques : Duffy est galloise, The Kinks fondé à Londres, Jeff Beck un guitariste britannique originaire de Wallington, The Who tout ce qu'il y a de plus anglais, The Troggs également, idem pour The Hollies, Chris Andrews est né à Londres, Paul Jones à Portsmouth, The Tremeloes est un groupe de rock britannique, Cream avec Clapton dans ses rangs ne peut être que britannique également, Procol Harum est un groupe de rock progressif britannique, Cat Stevens londonien, The Moody Blues originaires de Birmingham, Dusty Springfield une chanteuse britannique, Let's dance date effectivement de 1983 mais elle est chantée par Bowie qui débuta en 67, Van Morrison est né à Belfast, Lulu est écossaise, inutile de préciser pour les Stones, Arthur Brown originaire du Yorkshire, The Yardbirds un groupe britannique, The Small Faces un groupe londonien, Sandie Shaw née à Dagenham, Eric Coates un compositeur britannique, et les Beatles... bref.

On peut donc sans mal affirmer que ce film a une très forte consonnance britannique (d'où ma remarque sur le fait que "le rock anglais des années 60 a enfin sin film") mais effectivement ce n'est pas exclusif, beaucoup de groupes de nationalité différente (américaine notamment) sont présents.

Alors oui, c'est être un peu restrictif de ne pas expressément souligner le fait que c'est un film musicalement anglophone, mais je ne crois pas avoir prétendu, ni dans mon commentaire, ni dans ma critique, qu'il était 100% anglais. Wayne's World n'a d'ailleurs pas dans sa bande originale des groupes de rock des années 80 exclusivement américains. La majorité l'est, en revanche. Mais le commentaire que tu soulignes a surtout pour vocation de répondre à Astraal avec qui j'ai eu cette discussion à maintes reprises, dans laquelle il s'étonnait de ma non-attirance pour les Beatles, leur ayant toujours préféré les Stones. Il en avait donc conclu, me semble-t-il, que le rock anglais des sixties ne me plaisait pas. Je voulais donc rectifier cela.

Merci en tout cas de ton passage et de ton commentaire, c'est un plaisir de te répondre.

12 mai 2009 à 13:19
Caroline Poggi  

Une réponse plus concise aurait été préférable (D'où mon commentaire ponctué d'un "ETC"). Je ne pas besoin d'une leçon de musique. Mais bon, on s'est tous ici que tu aimes bien étaler tes connaissances ^^. (Joke)

Mais bon, critique cliché sur une époque ("d'un temps où la musique rock était un plaisir et un cri"; "Même les baisses de rythme s'avèrent salutaires, à l'image du rock...") car peut-être film cliché sur cette même époque.


Enfin voilà ceci n'est pas un commentaire méchant, mais juste un agacement qui depuis la re-naissance des baby rockeurs (et de leurs propos similaires à cette article) ne cesse de m'habiter.

12 mai 2009 à 14:04
Caroline Poggi  

on sait*

12 mai 2009 à 16:25
Lili  

"D'une mélancolie surannée qui caresse l'échine d'un film nimbé d'un grain de folie"

J'ai envie de dire LOL!







(boutade)

13 mai 2009 à 13:52

"Cependant la majorité des groupes demeurent britanniques : (...) bref."

13 mai 2009 à 13:54

zomagad on a retrouvé le schtroumpf grognon !

13 mai 2009 à 14:13

Pour moi, c'est pas un "A" film, un très très bon, un excellent moment, mais ça te ressort de la tête 20 minutes après la séance, ça ne marquera pas les esprits...si ?

Par contre, il serait temps que je me fasse une soirée Philipp Seymour Hoffman, ce mec est absolument génial quoi qu'il joue, et une fois de plus en "Comte" (y a un jeu de mots en anglais intraduisible) je n'ai pratiquement regardé que lui...

14 mai 2009 à 17:53

@ Caroline Poggi : Je me réserve un droit de réponse ultérieurement, ton commentaire me poussant à privilégier un dialogue de vive voix.

@ Lili : La portée comique du propos relevé m'échappe. Pour que l'on profite de ta "boutade", peut-être pourrais-tu préciser ta pensée ?

@ Anonyme : On me reprochait dans un commentaire précédent mon manque de concision, c'est le trop plein de laconisme qui rend hélas le tien incompréhensible.

@ ada : No comment. Cela dit le commentaire que tu avais laissé précédemment et que tu as supprimé était plus éloquent (et oui, en ces lieux, je sais tout !). Peur du retour de bâton ? ;)

@ Arwen : je n'aurai pas imaginé un seul instant que ce film puisse diviser à ce point, même si le clivage entre les deux avis reste peu important (ce n'est pas comme s'il y avait ceux qui détestent Good Morning England, et ceux qui l'adorent).

Pour te répondre de façon très personnelle, j'ai vu le film il y a une semaine, et j'y pense encore. Le dynamisme, le montage, les acteurs, la musique... Il y a énormément d'éléments plaisants dans ce film pour justifier la note que j'ai mis et l'achat du DVD que je ferais lorsqu'il sera en vente. Je pense ma critique, réussie ou non, suffisamment complète pour arguer en la faveur du film de Curtis.

Je suis plus dubitatif concernant Philipp Seymour Hoffman qui, s'il est un bon, acteur, ne fait pas que de grands films. Doute est un film par exemple très dispensable (tu trouveras d'ailleurs la critique sur CinéBlog). Mais effectivement, dans le rôle du Comte, il est prodigieux. Ils le sont tous, de toute façon.

14 mai 2009 à 23:10

han big brother is watching me ! :)

D'accord sur Philip Seymour Hofman. Il a parfois fait des fims tout à fait dénués d'intérêt mais ! après l'avoir vu dans 7h58 ce matin là de Lumet ... j'avoue que je pense qu'il a réellement quelque chose à sortir !

Sinon pour les désaccord sur ce film j'ai envie de dire que parfois tu te rend compte que des gens sont tout simplement incapables d'utiliser un certain nombre de muscles et nerfs situés aux alentours de la bouche pour effectuer ce que certains extra-terrestres appellent un sourire.

C'est vrai que lorsqu'un film est destiné à éclairer une journée peut être morose d'un éclair de plaisir brut, chose bien rendue par la critique dont le fond n'a pas changé par rapport à ce qui est usuel ici mais dont la forme s'est adaptée au propos du film, meilleure manière s'il en est de faire savoir que le réalisateur a pleinenement réussi son pari, la réaction naturelle est bien entendu de discuter avec un ton acerbe de la nationalité du mec qui a fait le jingle pub de radio rock. (PARCE QUE OUAIS LE JINGLE PUB AUSSI C'EST DE L'ART MERDE QUOI ! ON PARLE DE ROCK ET TOUT MAIS QUI PARLE DU JUNGLE PUB ?!) [Comment ça ya pas de pub sur radio rock?]

Missed something maybe ?

15 mai 2009 à 11:58

@ ada : C'est du Lumet, aussi :)
Ce n'est pas comme s'il avait été entre les mains de n'importe quel réal' ! Mais effectivement, je l'ai trouvé dans une majorité de films vraiment excellent. Même dans Mission : Impossible 3, je l'ai trouvé très bien comme méchant.

Tu es le premier à me dire que la critique épouse la forme et le fond du film. Ce que l'on appelle dans le jargon professionnel une critique imitative. Et bien je te remercie d'avoir compris cela, il faut croire que cela échappe à certains (dont Astraal ! bouuuh !)

Je te confirme, you've missed something, car cela n'a pas l'air de venir de la critique en elle-même uniquement.

16 mai 2009 à 09:24

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