La sortie d'un long métrage de
Hayao Miyazaki est toujours un évènement en soi. Auteur de chefs-d'oeuvre tels
Mon voisin Totoro,
Le Voyage de Chihiro, ou dernièrement
Le Château ambulant,
Miyazaki est aussi l'un des fondateurs du Studio Ghibli dont la réputation n'est plus à faire. Studio entièrement dévolu aux films d'animation, le succès critique et public des oeuvres réalisées sous la direction de l'un des maîtres du genre n'a jamais fait démentir les raisons de sa notoriété. Il faut dire que
Miyazaki a été à très bonne école, puisqu'après avoir fait ses débuts dans le studio d'animation Tôei dans les années '60 (la référence nippone à cette époque), il y rencontra un homme qui devint son mentor et avec qui il fonda Le Studio Ghibli, le bien nommé
Isao Takahata (réalisateur du
Tombeau des lucioles).
Véritable magicien du crayon, Dieu vivant au Japon,
Miyazaki est un artiste issu d'une race en voie d'extinction, qui sait faire rimer à merveille poésie et nostalgie, simplicité et profondeur subtile. Sa nouvelle création s'inspire de
La Petite Sirène, conte d'Andersen déjà porté à l'écran en 1990 par
John Musker et
Ron Clements pour le compte des studios Walt Disney. Pourtant, il apparait évident après quelques minutes que
Ponyo sur la falaise a une âme qui lui soit propre, un univers et une dimension miyazakienne, une beauté et une grâce sans nul autre pareil, et une conduite narrative miraculeusement envoûtante ne laissant que très peu de place à la négation. C'est aussi ça, la magie
Miyazaki.
Ponyo sur la falaise, c'est avant tout l'histoire de deux enfants s'aimant malgré leur différence. L'un est un petit garçon ordinaire et plein d'innocence mais sacrément dégourdi, l'autre est un petit poisson rouge qui rêve d'un monde plus grand et plus vaste que le fond des océans. Ode à la vie et à l'amour prônant la tolérance, Miyazaki n'oublie pas pour autant ses préoccupations écologistes de toujours, celles-ci étant astucieusement présentes et disséminées à travers certains plans, d'une simple canette de soda flottant sur l'eau dans un coin de l'écran aux discours de Fujimoto abordant la destruction de la nature par la cupidité de l'homme, figure de proue de l'Oeuvre miyazakienne et thème récurrent déjà présent dans Nausicaä de la vallée du vent ou Princesse Mononoké.
Porté par les mélodies ensorcelantes de Joe Hisaishi, compositeur fétiche de Miyazaki depuis de nombreuses années, Ponyo sur la falaise marque ainsi la neuvième collaboration entre les deux hommes. Leur complicité artistique se ressent depuis le commencement, avec cette approche presque candide de lier essence de l'être humain et magie du monde en trouvant une harmonie intimiste dénuée d'aprorisme socio-culturel. Une vision enfantine du cosmos qui a le don de nous entraîner malgré notre quotidien pesant dans un univers evanescent et onirique jusqu'à nous faire retrouver l'espace d'un film nos yeux d'enfants.
Miyazaki tenait à donner à sa dernière création une direction esthétique visant l'épure. La 3D du Voyage de Chihiro et du Château ambulant laisse la place à l'animation traditionnelle pure, avec une forte prééminence pour la composition spatiale et l'éclat de la couleur. Un monde tout en pastel favorisant la féérie visuelle et participant tant à nous enchanter qu'à nous ébahir. La magie opère même si les défauts sont présents, car ils participent d'un tout qui permettent l'éveil d'un inconscient collectif destiné à rêver avant tout jusqu'à ce que les déceler en devienne contingent. On appelle également cela le génie.
En bref : Miyazaki signe avec Ponyo sur la falaise une fable écologique dans laquelle émerveillement rime avec constant. Débordant d'élégance et d'inventivité, l'univers coloré de cette oeuvre entraîne vers les délices de l'enfance qu'il est toujours agréable d'à nouveau savourer tant avec les yeux qu'avec le coeur. La poésie enchanteresse réussit, comme toujours chez Miyazaki, à nous faire oublier les quelques défauts qui n'ont au final que peu d'importance. Certainement pas le meilleur du maître, mais assurément magique.
Rang : B
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