Autant dire que malgré un Batman begins m'ayant relativement laissé sur ma faim (même si ce dernier était tout de même bien plus réussi que les deux opus réalisés par Joel Schumacher - ce qui, en soit, n'est pas bien compliqué), The Dark Knight était LE film le plus attendu par votre humble serviteur.
Tout portait à croire que ce second volet d'une trilogie annoncée serait une réussite, tant Christopher Nolan semble avoir passé un cap avec le brillant The Prestige, sans oublier la présence d'un "méchant" digne de ce nom (ce qui manquait au premier volet), à savoir The Joker.
C'est en parti exact. En parti, seulement...
Car, il faut bien l'admettre, The Dark Knight laisse un arrière-goût désagréable sur le palais. On ressort de la salle de cinéma très mitigé, entre la déception et une grande hâte de découvrir la suite des aventures de l'homme chauve-souris.
Force est de constater que le film de Christopher Nolan est impressionnant dans la déconstruction du mythe du chevalier noir de Gotham City autant que dans la construction de la dramaturgie : les évènements se succèdent les uns après les autres, et l'on sent monter crescendo la violence et l'impact des évènements sur les frêles épaules de notre justicier masqué à un point tel que les presque 2H30 qui composent le long métrage nous apparaissent bien courtes.
Nolan a voulu aborder le mythe du Batman avec le plus de réalisme et le plus de noirceur possible, le pari est réussi. Malheureusement, Chicago (lieu de tournage de TDK) n'est pas Gotham City, et même si la ville reste bien plus crédible et absorbante que ce qu'elle fut dans Batman begins, on regrette parfois l'aspect gothique et dérangeant si brillamment présent dans les deux opus réalisés par Tim Burton.
De même, le nouveau Batsuit rélève d'un fort mauvais goût et continue de nous confronter à des choix artistiques venant saper le mythe. Alors certes, tourner la tête est bien plus pratique pour Batman (et le clin d'oeil est de taille pour un Christian Bale s'étant plaint de ne pouvoir le faire avec le premier Batsuit) mais et la carrure du personnage ? Celle-ci perd de son massif et le but premier du costume, à savoir instiller la peur dans le regard de ses ennemis, devient le pratique et non le symbole. Un comble pour un Bruce Wayne ayant insisté sur ce propos dans le premier volet !
Non content de lui faire porter un Batsuit encore moins réussi que le premier, sans oublier cette fameuse voix sombre que prend Christian Bale sous les traits de son personnage masqué, hérissant le poil à plus d'un(e), Nolan décide de nous montrer un Batman dépassé, affaibli, plein de bonnes intentions en évitant de tuer. Cette hésitation à passer de l'autre côté de la barrière est certes louable, mais lorsque l'on décide de faire une triologie sur l'homme chauve-souris s'inspirant de la vision de Bob Kane et plus récemment du travail fantastique de Frank Miller, à savoir un univers noir, violent et cynique, les bons sentiments du héros tendent vite à énerver !
Le Batman de Tim Burton n'a jamais hésité, et cela colle bien mieux au personnage. Batman n'est pas Spider-Man : c'est avant tout un être dévoré par la vengeance, un justicier psychopathe (justice et lois ne sont jamais compatibles, diront les joueurs de Champions).
À côté, en ennemi juré se retrouve l'un des plus grands super-vilains de l'histoire de DC comics : The Joker.
La première scène de braquage, d'une maîtrise hallucinante, installe déjà les jalons de la réussite du personnage. Puis vient la fameuse scène du "tour de magie" avec le crayon, et là, nous sommes conquis : jamais Heath Ledger n'avait été aussi brillant et habité par son personnage que sous les traits torturés du Joker. L'attitude, l'intonation qu'il donne à sa voix, la gestuelle, le petit tic facial au niveau bucal... Toute la prestation tient du génie et je n'ose pas imaginer que l'acteur ne puisse remporter un oscar, hélas posthume, pour nous avoir dépeint un Joker en icône parfaite du chaos et de l'anarchie. Je n'entrerai pas dans le débat stupide de savoir qui de Nicholson ou Ledger fut le meilleur Joker (ce sont deux films, deux époques, deux réalisateurs, deux approches différentes) mais il est certain que tout l'intérêt de The Dark Knight réside dans le non-plan machiavélique du diabolique ennemi de Batman. Une véritable surprise.
Les autres rôles ne sont pas en reste, avec un Aaron Eckhart en Harvey "Double-Face" Dent toujours aussi juste dans les prestations qu'il fournit (mention spéciale pour ses performances dans Erin Brockovich et Thank You for Smocking), Michael Caine cabotinant joyeusement sous les traits du fidèle Alfred, et Gary Oldman dont le personnage James Gordon prend tout son poid dans cet opus.
En clair, seul Christian Bale loupe le coche, ce qui passe plutôt mal quand le film s'appelle "The Dark Knight" et non "The Joker". Batman se fait-il voler la vedette pour mieux la reprendre dans le troisième volet ?
Fort heureusement, les autres aspects du film ne décoivent pas : une Batmoto qui a une gueule folle, une Batmobile qui vole enfin en éclat, nous laissant caresser l'espoir que le prochain long métrage consacré aux aventures de l'homme chauve-souris contiendra une Batmobile digne de ce nom (parce que bon, le mini-tank, voilà quoi...).
L'action et le suspens se succèdent avec virtuose (merci au montage fort bien équilibré entre scènes intimes et scènes intenses) et mis à part des scènes de combat au corps à corps un poil trop répétitives, The Dark Knight tient toutes ses autres promesses.
Dommage que le plus important soit raté...
En bref : The Dark Knight est le blockbuster de l'été à ne pas râter. Nolan a su tirer parti de ses erreurs sur Batman begins et réussi donc bien mieux le second volet de sa trilogie consacrée au justicier masqué. Plus long, plus intense, plus maitrisé, avec un méchant haut en couleur, TDK décoit pourtant avec un Batman hélas trop tatillon, perdant de sa carrure et de sa prestance, et une ville toujours aussi peu convaincante dans un univers qui se voudrait, bien que réaliste, beaucoup plus sombre que les films ne le laissent paraître.
Rang : B
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on 30 août 2008
at samedi, août 30, 2008
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Critique de film
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